La naissance du village

La construction du village ne peut être expliquée de manière exhaustive du fait de la disparition d'une grande partie des archives historiques ayant été brûlées ou bien perdues lors des deux Guerres mondiales. Cependant, plusieurs informations peuvent être trouvées dans le livre de Pierre Estivandier "Saulcy sur Meurthe et le Val de Galilée". Ainsi, grâce à ce livre, on apprend que la première trace écrite de Saulcy sur Meurthe ne remonte qu'à 1188. Le village est alors une dépendance du Val de Galilée, bien qu'il possède déjà à ce moment une identité propre puisqu'il se nomme "SALZEIS". Les origines du nom de Saulcy sur Meurthe proviennent de l'appellation d'un arbre nommé "l'aune" ou "le saule Marsault". C'est pourquoi lorsque plusieurs hommes découvrirent que l'écorce de l'aune était un remède efficace contre le fièvre des marais, ils s'établirent dans les terres basses où l'eau affluait de toute part. "Mais au centre de leur vie, demeurait la colline, le mont de la lune, dont le nom transcrit en grec, devint ANOSELENE, avant d'être changé graduellement, d'une variation dialécticale à l'autre, en ANOZEL."(Saulcy sur Meurthe et le Val de Galilée - Pierre Estivandier)". Anozel est actuellement le nom d'un quartier de Saulcy sur Meurthe, c'est donc à partir de ce moment que des hommes décidèrent de fonder une communauté qui petit à petit se transformera en un village dont le nom, après s'être orthographié de 28 façons différentes jusqu'en 1854, deviendra finalement "Saulcy sur Meurthe".

 

René Fonck

Né le 27 Mars 1894 à Saulcy sur Meurthe, René Fonck est d'abord tisserand puis apprenti mécanicien (chez Gantois). Appelé sous les drapeaux le 22 Août 1914, il est versé au 11ème régiment du génie d'Epinal où il fait ses classes. Fasciné par les exploits des aviateurs depuis longtemps, il réussit à intégrer l'aviation début 1915. Elève pilote à l'école Caudron du Crotoy, il débute dans l'escadrille d'observation C47 à Corcieux. René Fonck est l'As des As Français et Alliés de la guerre 1914-18 avec 127 victoires dont 75 homologuées. Versé au groupé de combat 12 ou "groupe des cigognes", plus précisément à l'escadrille 103, il abat jusqu'à six avions en une seule journée (9 Mai et 26 Septembre 1918). Il termine la guerre avec tous les honneurs, portant la Croix de Guerre 1914-1918 à 28 palmes et une étoile (la plus "chargée" à ce jour). Député des Vosges de 1919 à 1924 il rédige ses mémoires "Mes Combats" et ses vues sur l'aviation militaire et civile dans "L'aviation et la sécurité française". En 1926, il tente la traversée de l'Atlantique sur le S-35 en collaboration avec Igor Sikorsky mais la tentative échoue : l'avion s'écrase au décollage tuant deux membres de l'expédition. Colonel d'aviation il entre au service du gouvernement du Maréchal Pétain. C'est lui qui prendra contact avec une vieille connaissance, Goering, afin d'organiser la rencontre de Montoire d'Octobre 1940. Devenu suspect aux yeux Allemands par ses interventions au profit de résistants et par son opposition à Laval, il n'en sera pas moins arrêté en Septembre 1944 par les Forces de Libération avant d'être libéré sans charge à son encontre. Retiré de toute vie publique après la Libération, il se consacre à la gestion de son entreprise d'engrais de Saulcy sur Meurthe et meurt à 59 ans le 18 Juin 1953 à Paris. Il est inhumé au cimetière de Saulcy sur Meurthe, son village natal.

 

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La seconde guerre mondiale

Si Saulcy est un village très ancien dont on retrouve les traces dès 660 (appelé SALZEIS ou Cité des Saules), son histoire est malheureusement liée aux guerres toutes proches. Par deux fois en un siècle, la commune fut touchée très lourdement. Tout d'abord, durant la guerre 14-18 (et plus particulièrement par les bombardements allemands de 1915) et surtout en Novembre 1944. En 1941, les allemands s'étant installés dans la commune, l'occupation était une réalité de tous les jours. Trois généraux avaient expulsé les prêtres et les Sœurs chanoinesses du château du séminaire pour y installer leur Kommandantur et leurs subordonnés avaient élus domicile chez l'habitant. A partir de Septembre 1944, alors que les troupes américaines approchent, la répression s'intensifie : les allemands incendient deux maisons, tuent un cultivateur, réquisitionnent massivement tout ce qui peut être utile (vêtements, nourriture, outils) et surtout la main d'œuvre des hommes valides pour créer une grande tranchée de protection. Le 7 Novembre, René VAUCOURT, le Maire, est chargé de diriger tous les hommes de 16 à 50 ans sur Saint-Dié. Devant son refus d'obtempérer, c'est la Gestapo qui viendra chercher une soixantaine d'hommes le 08 Novembre 1944 pour les déporter vers Mannheim, où ils serviront de main d'œuvre "gratuite" aux entreprises allemandes. Le 11 Novembre, les allemands font évacuer la rive droite de la Meurthe et replient tous les habitants vers les Cours. Pendant les jours suivants, les incendies succèdent aux pillages. Les maisons individuelles mais aussi la mairie, les deux écoles, l'église, le presbytère, le château, le séminaire, les tanneries, les tissages, les scieries et les manufactures sont systématiquement détruits. Le 16 Novembre, les allemands reproduisent le même schéma au secteur des Cours et de l'Anozel. Toute la population, y compris ceux qui ont déjà vu disparaître leur foyer quelques jours plus tôt, doivent évacuer en quelques heures. Les allemands n'attendent même pas leur repli pour incendier toutes les maisons. Des centaines d'habitants se réfugient au Moulin Rhor, épargné, et dans quelques maisons encore debout. Beaucoup dorment et se cachent sous la neige, fuient vers le col du Bonhomme, en traînant derrière eux quelques effets dans des charrettes. Le village n'est plus qu'un immense brasier. L'hiver 1944-45 sera particulièrement rigoureux, et les salixiens, livrés à eux-mêmes, se réfugieront dans les caves et les ruines de leurs maisons. Des baraques provisoires seront ensuite construites, mais cela attendra encore de longs mois. Certaines y resteront jusqu'en 1970 ! Cliquez ici pour retrouver un petit mémoire concernant les victimes de guerre de 1939/1945 de notre commune.

 

Les déportés de Saulcy

Depuis plusieurs mois, les Allemands avaient planifié l'anéantissement de la Résistance dans les Vosges et l'élimination des hommes qui auraient pu soutenir l'arrivée des Américains. Oberg, chef de la Police et des SS en France, avait préparé les pillages et les incendies ainsi que les déportations. Depuis Septembre 1944, les Allemands installés à Saulcy avaient réquisitionné tous les hommes valides. Leur but était d'établir une grande tranchée en zigzag entre Belfort et Saint-Dié, destinée à arrêter les Américains retardés de l'autre coté du col et attendant leur ravitaillement. Le 8 Novembre 1944, une grande rafle fut mise en place par les Allemands assistés de la Gestapo. Tous les hommes de 16 à 60 ans furent emmenés de force : environ 60 de Saulcy, d'autres d'Entre-deux-Eaux ou encore de Saint-Léonard, et 950 de Saint-Dié. Le rassemblement et le départ se firent en quelques minutes. Ni bagages, ni adieux...Les larmes des mères, des épouses et des enfants, et la douleur de la séparation ne changea rien. La destination initiale devait être les camps d'extermination, mais les convois du 08 Novembre finirent leur route dans quelques villes du pays de Bade où le Gauleiter de la région avait obtenu de la main d'œuvre très bon marché pour les industries allemandes. Les Salixiens du village ayant pris le train à Provenchères s'arrêtèrent à Mannheim pour être enrôlés dans des entreprises de travaux publics. Il fallait consolider et reconstruire après chaque bombardement allié...Les Salixiens des Cours, prirent la direction de Saint-Léonard, puis du col du Bonhomme avant de rejoindre une autre vallée allemande. Ce n'est que fin Mars 1945, que ces hommes retrouvèrent leur liberté, et purent, par leur propres moyens rejoindre leur famille et retrouver leur village complètement détruit...

 

La résistance à Saulcy

Le réseau sur Saulcy a été créé par M. Raymond Panin. A partir de 1942, les résistants se retrouvent clandestinement à la Tannerie Grosjean, cachent des armes, effectuent de petits sabotages. Leur principale activité est de faire fonctionner la chaîne de passage de prisonniers, d'alsaciens ou de réfractaires au STO (le point de chute était souvent Corcieux qui prenait ensuite le relais). En Septembre 1944, l'ordre de Londres tant attendu arrive enfin. Il s'agit de réceptionner un parachutage de 36 avions sur le plateau de Fouchifol afin de permettre la capture de 3 généraux allemands qui avaient installé leur Kommandantur au séminaire de Saulcy. A cause du mauvais temps, le parachutage ne se fait pas. Mais les allemands ont été informés et les combats s'engagent. Deux maquisards de Plainfaing sont faits prisonniers et pendus par les allemands, Fernand Fleurentdidier et Marcel Kuntzmann. Fouchifol est incendié en représailles le 06 Septembre. Au château Fonck, aux Censes, le capitaine Raymond Panin avait organisé son réseau de résistance. Il s'agissait d'un passage pour les prisonniers de guerre évadés, les réfractaires désirant rejoindre la zone libre. Avec les membres du maquis de Fouchifol, le réseau fonctionna durant toutes la guerre. La chaîne permettait de relayer avec les réseaux de Combrimont et Etival, vers les gares de Saint-Dié ou Vanémont. En 1944, un aviateur américain, Jérôme Harley trouva refuge auprès de M. Panin. Il fut d'abord caché dans le château alors même que des généraux allemands avaient réquisitionné une partie des bâtiments. Par la suite, on le présenta comme un neveu sourd et muet. Cela dura presque trois mois mais sur dénociation, M. et Mme Panin et l'aviateur, furent arrêtés et déportés. Raymon Panin sera déporté à Gaggenau où il mourra le 13 Mars 1945. Yvonne Panin sera déportée sur Schirmeck d'où elle s'échappera lors d'un transfert en camion vers un autre site. Elle recevra la légion d'Honneur en 1983, qui s'ajoutera à de nombreuses autres distinctions dont la Médaille Militaire de la Croix de Guerre. Quant au jeune lieutenant Jérôme Harley, il succombera à Nancy.

 

La libération de Saulcy

Les jeunes soldats américains de la "Cactus Division" débarquant tout juste sur notre territoire, ne connaissent pas encore la guerre. Ils ne gardent que leurs armes, leurs munitions, leurs casques, un sac de couchage et une gamelle, nécessaires à tout fantassin de campagne. Ils s'organisent rapidement, prennent facilement Taintrux (les allemands ayant pris la fuite), puis après de rudes combats, occupent le Kemberg et l'Anozel. Les 409ème et 410ème Régiments prennent alors position à Nompatelize, afin de préparer la traversée de la Meurthe, pour délivrer Saint-Dié, alors que le premier bataillon du 411ème du colonel YEUELL reçoit pour consigne de libérer Saulcy-sur-Meurthe puis Combrimont. Dans un large mouvement, les GI's rencontrent peu d'opposition, libèrent Le Ménil, Les Censes et l'Anozel et arrivent aux Cours de Saulcy, où ils doivent se battre et subir les coups de l'artillerie ennemie pour établir un pont sur la rivière. Deux compagnies réussissent à traverser. Saulcy-sur-Meurthe est libérée le 21 Novembre. Mais la résistance se durcit près du Cimetière Militaire sur la colline "Le Haumon" où une cinquantaine d'ennemis sont signalés. La compagnie A subit de grosses pertes : 6 de ses soldats sont tués, 17 sont blessés dans des combats d'arrière-garde. Les Américains qui pénètrent dans Saulcy, trouvent un village exsangue et vidé de ses habitants. Le 411ème renforcé par le premier bataillon du 409ème poursuivra sa route depuis Saulcy jusqu'à Remémont où il capturera 40 Allemands. Il poursuivra sur Sainte Marguerite puis Remomeix, Coinches, Raves, Bertrimoutier et enfin Combrimont le 24. C'est la fin de la bataille des Vosges pour les soldats de la 103ème. Fin Novembre le bilan de ces combats est lourd mais riche : ils ont réussi à traverser la chaîne des Vosges, se sont durement battus, ont fait 600 ennemis prisonniers mais déplorent 76 tués, 51 disparus, et 549 blessés. Leur chemin se poursuivra ensuite vers l'Alsace puis l'Allemagne comme le montre le tableau suivant retraçant les combats de cette division. En Octobre 1989, Monsieur Petot, Maire et le surintendant Prieur, représentant les troupes américaines, inaugurent une stèle, érigée devant le cimetière militaire, rue du Maréchal de Lattre de Tassigny, afin de perpétuer le souvenir des 8 jeunes soldats américains tombés aux portes de notre Commune. Grâce à leur sacrifice, les dernières résistances allemandes tombaient et Saulcy était définitivement libérée. Depuis, chaque année, une journée de mémoire ponctue notre mois de Novembre et fréquemment, des vétérans de la 103ème traversent l'Atlantique pour se souvenir. Les 8 GI's tombés à Saulcy : Rosendo GARDENAS, Simonton, Texas / Franck CARRACCIO Jr, Centerville, Iowa / Edward V. CIRILLO, Newark, New-Jersey / Bayard DODGE Jr, Bronx, New York / Russel FUCCY, Detroit, Michigan / Henry GAYNOR, Brooklyn, New York / William JAMES, Metropolis, Illinois / James H. VANOVER, Indépendance, Missouri.

La ville de Moulins-sur-Allier, et le comité officiel de parrainage du Bourbonnais Lorraine (crée depuis la Libération) ont permis de donner une aide substantielle et indispensable à notre commune de Saulcy après sa complète destruction en Novembre 1944. Ils agirent tout d'abord dans l'urgence avec une aide matérielle en envois de vivres, couvertures et biens de première nécessité. Le comité s'occupa des enfants qui n'avaient plus de toit...des colonies furent organisées et le Comte de Bourbon mit son château à disposition. L'un des premiers volontaires fut M. Pierre COULOMBEL qui se dévoua sans compter, Professeur agrégé de droit à la Faculté de Nancy, il mourut à l'âge de 45 ans et sa mère légua à la commune le terrain sur lequel le stade qui porte son nom a été créé. Puis le comité entra dans des aides de plus longue haleine, notamment des aides à la reconstruction. C'est ainsi que le foyer rural - salle des fêtes a été construit. La rue de la Mairie porte en leur honneur le nom de notre commune marraine, la ville de Moulins-sur-Allier.

 

La famille Folmard

Il se trouve à la sortie du village, coté Sainte Marguerite, route du Pair, une stèle érigée à la mémoire de Marcel et Georges Folmard, commémorée chaque année par la Commune. Marcel Folmard, né en 1898, était ébéniste d'art. Licencié pour militarisme syndical, il devint cafetier avec son épouse, à Saint-Dié, rue de la Ménantille. Mobilisé en 1939, prisonnier en Allemagne, il fut libéré après 9 mois de captivité en qualité d'ancien combattant de la guerre de 1914-18. Il entra alors en Résistance, dans le réseau "Résistance-Fer" et son café devint un refuge pour les réfractaires du STO, les évadés. Le 3 Septembre 1944, sur dénonciation, la Gestapo fit une descente au café. Emmené au siège de la Gestapo de Saint-Dié (le château Burus), il fut abominablement torturé (ongles arrachés, mains écrasées, mâchoire fracturée par une balle), puis traîné encore vivant pas un cheval. Son corps sera découvert le lendemain à l'entrée de Saulcy par M. Desroses, cultivateur. Il n'avait pas parlé, et aucune arrestation dans son réseau ne suivit son martyr. Georges Folmard est le fils aîné de Marcel et Marguerite. Instituteur en Haute-Saône, il fut appelé pour rejoindre les rangs du STO (Service de Travail Obligatoire). Réfractaire, il rejoignit le maquis de Belfortoù il devint Lieutenant FFI. Fait prisonnier le 21 Septembre 1944, il fut déporté à Schirmeck, Dachau, Blechammer sur Oder, Auschwitz puis Gross-Rosen. A 22 ans, il mourra d'épuisement sur le bord du chemin en Février 1945, alors que les allemands évacuaient les camps pour fuir l'avance soviétique. Durant sa période de résistance, il avait épousé Simone Terrier. Elle accouchera de Claude, leur fils, en Décembre 1944, sans l'avoir revu. Marguerite Folmard, née Rouleau, était la femme de Marcel, et la mère de Georges et Odette. Aux cotés de son époux, elle résista à l'occupation allemande. Arrêtée en même temps que Marcel, elle fut transférée à Schirmeck puis déportée au camp de Gaggenau. De retour en Avril 1945, elle retrouva sa fille Odette âgée de 10 ans et cachée par la voisine durant tout ce temps. Elle reprit un café restaurant où elle accueillit sa belle-fille Simone et son petit-fils, et s'engagea dans le monde associatif. En 1981, elle sera nommée Chevalier de la Légion d'Honneur. Elle est décédée en Décembre 1992.

 

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